Placée sous l’emprise des extensions glaciaires, la montagne a constitué, au cours de la dernière période glaciaire, un obstacle absolu à toute pénétration humaine.
Aussi est-il intéressant de confronter les modalités de pénétration et d’exploitations saisonnières au cours des périodes qui encadrent cette glaciation: au Paléolithique moyen (Moustérien) d’une part et à la fin du Paléolithique supérieur (Magdalénien et Azilien) et au Mésolithique d’autre part.
LE MOUSTÉRIEN DES ALPES ET L'EXPLOITATION SAISONNIÈRE D'UN MILIEU MONTAGNARD
Thierry Tillet
Les sites moustériens alpins et jurassiens se subdivisent en trois groupes: les stations de plein air, les gisements en grotte ou sous abri très anthropisés et les gisements en cavité à indices de passage humain. Ce qui distingue principalement les trois groupes, c’est la fonction même des gisements. En effet, les stations de plein air d’altitude apparaissent plutôt, dans l’ensemble, liées à des stratégies d’approvisionnement en matière première siliceuse. Autrement dit, la plupart des gisements de plein air dans l’arc alpin sont des ateliers de taille ou «ateliers-habitats». Les gisements fortement anthropisés, à l’entrée des grottes ou sous abri, semblent plutôt liés à des stratégies d’exploitation saisonnière des ressources animales. Quant aux gisements en cavité, à indices de passage humain, ils correspondent plus à des gisements paléontologiques où les quelques artefacts lithiques ne constituent que des intrus. La présence de ces artefacts au milieu des vestiges de faunes (en particulier l’ours spéléen) est due, le plus souvent, à un apport naturel par ruissellement ou «charriage à sec» depuis le porche de la grotte, où une installation néandertalienne très ponctuelle a eu lieu. Les grottes comportant des industries moustériennes du pourtour de l’arc alpin sont presque toujours des repaires hiémaux d’ours spéléens, et par conséquent correspondent plutôt à des gisements paléontologiques où les deux occupations - l’une en profondeur et l’autre sous porche - sont alternatives. Les liens entre ces deux occupations sont loin d’être établis, si lien il y a eu. Ce sujet fut à l’origine d’une méprise considérable qui fit couler beaucoup d’encre au cours d’une grande partie de ce siècle...