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Page:Labi 1998.djvu/67

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nocturne[25] aussi, car la nuit est du domaine des esprits, comme de l’être sauvage berger/ère.

Dans tous ces passages, la demande d’entraide est étrangement repoussée («ce serait votre plus gros ennemi...»), renvoyée au dernier (ou bien l’aide est étrangement vite donnée: tenir le mulet prendrait trop de temps), ce dernier qui ne peut plus refuser (ou ce qui revient au même, celle qui se fait piéger en tenant ce mulet). Résultat: cet instant d’éternité de perdu vaudra de sept à cent ans (plusieurs années en tous cas). Le temps d’ici et celui de l’au-delà n’est pas le même: s’en aperçoit celui qui en revient et qui blanchit à l’instant ou tombe en cendres.


LES FÉES ET LES AVATARS HISTORIQUES DU BANQUET DES ESPRITS OU DES MORTS

Quel est le rapport entre les fées - êtres sauvages - et les morts? Voici deux documents locaux qui permettent de confirmer qu’une relation de ce type, que nous allons retrouver d’un point de vue comparatif dans le folklore européen, peut exister dans la région-même de ces errances.

[La belle tasse des fées] Mon arrière-grand-père, Jean-Pierre Vollaire (1800-1870) se rendait, à la tombée de la nuit, de La Saulce au Plan de Vitrolles. Quand il s’est trouvé au quartier de Saint-Antoine, il a vu des fades qui dansaient. En voyant passer mon arrière-grand-père, l’une de ces dames se détache du groupe et vient lui offrir une belle tasse remplie de liquide. Il prend la tasse, mais avant de boire, il fait le signe de la croix. La tasse lui reste dans les mains et tout s’est évanoui. Il n’a plus vu ni fées, ni dames, ni personne. Il est remonté au Plan, mais s’il avait bu, il aurait été endiablé. Quelque temps après, on lui a réclamé cette tasse, par lettre, de Sisteron, et, malheureusement, il l’a rendue à son propriétaire. (Mme Thérèse Garcin, 62 ans. Le Plan de Vitrolles, Vitrolles, Hautes-Alpes, 1960)

[Les verres d’argent des francs-maçons] J’avais un de mes oncles qui me racontait puis, il disait comme ça: un jour qu’il passait du côté de Saint-Etienne [-le-Laus], à l’embranchement des routes, il a vu une troupe de jeunes qui s’amusaient, qui faisaient la ronde en buvant à des verres d’argent. Comme il passait, on l’a invité à boire avec eusses. Il n’a pas refusé, il a dansé et trinqué avec eusses. Avant de boire, il a fait le signe de la croix et tout est parti, et il est resté seul le verre à la main. Un autre jour à Gap il les a rencontrés. Ils lui ont demandé le vase, et il le leur a rendu. C’étaient des francs-maçons. (Mme Marie Peyrot 89 ans, Valserres, Hautes-Alpes, 1954) Nous sommes en présence d’un complexe légendaire, celui d’une «légende migratoire»,[26] qui a été bien identifiée par Donatien Laurent,[27] dans son

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ABRY ET JOISTEN: DE LA MIGRANCE A L'ERRANCE